La Vendée Arctique : bilan d’une course pleine de rebondissements

🕑 28 juin 2022

Une destination inédite, un parcours audacieux, une qualification à la clé pour le Vendée Globe 2024… Articulée sous la forme d’une grande boucle de 3500 milles nautiques entre les Sables d’Olonne et l’Islande, la Vendée Arctique les Sables d’Olonne s’annonçait déjà comme une course haute en couleurs et riche en rebondissements ! Si, de ce point de vue, l’épreuve a tenu toutes ses promesses, son programme ne s’est pourtant pas déroulé tout à fait comme prévu…

Une échappée belle et des passages à niveau

C’est avec l’envie d’être « dans le match » qu’Isabelle Joschke s’est alignée au départ de la Vendée Arctique le dimanche 12 juin. Si la skipper n’avait volontairement pas affiché d’objectifs de résultat, ses ambitions étaient clairement annoncées : boucler le parcours pour se qualifier pour le Vendée Globe 2024.

Après avoir pris un bon départ, Isabelle grapille les places au sein de la flotte des vingt-cinq solitaires engagés en IMOCA, tant et si bien qu’elle occupe la première position du classement au bout de 24 heures de course. Rapidement, une option stratégique se profile à l’horizon avec le passage d’une dorsale anticyclonique positionnée en travers de la route vers l’Islande. Dans cette zone sans vent, mieux vaut bien choisir sa route pour éviter de se retrouver embourbé. La grande loterie s’ouvre alors. Les concurrents ayant fait le choix d’un passage à l’Est sont ceux qui s’en sortiront le mieux. Pour Isabelle, c’est la douche froide. Après une première nuit de cavale dans des conditions idéales, la navigatrice se retrouve freinée dans son élan, alors qu’elle tentait de se frayer un chemin au centre de la dorsale.

Après de longues heures d’attente, l’arrivée d’un vent d’Ouest redonne de l’élan à Isabelle et son IMOCA MACSF. Ralentie un peu plus loin par un second passage à niveau, la skipper finit malgré tout par reprendre sa course vers le grand Nord, oscillant entre la 13e et la 17e place.

Un parcours modifié puis écourté

Aux abords de l’Islande, la météo se dégrade progressivement. La dépression a pris tant d’épaisseur qu’elle a fini par représenter une menace directe pour les skippers. Le jeudi 16 juin, compte tenu des conditions météorologiques très difficiles annoncées, la Direction de Course prend la décision d’annuler le tour de l’Islande. Un nouveau parcours de 3300 milles nautiques est redessiné, invitant les concurrents à franchir une porte virtuelle à la pointe la plus orientale de l’île. Alors qu’elle progresse vers l’Islande, Isabelle partage ses inquiétudes :

« Je vais être rattrapée par la dépression qui se creuse et être avalée dans son centre. L’objectif sera de rester toujours dans une zone de vent le plus près du centre pour ne pas être prise dans la tempête. Il va y avoir énormément de manœuvres à faire et c’est ça que je crains : d’être toilée pour 12 nœuds et que le vent monte soudainement à 30 nœuds. Demain (vendredi 17 juin), ce sera la même ambiance jusqu’à la porte. J’essaie vraiment de bien m’alimenter régulièrement, d’autant que je n’ai pas un appétit immense quand je suis en mer. Sinon je gère ma fatigue : dès que je peux dormir, je dors. J’essaie aussi de limiter mes manœuvres pour garder de l’énergie. »

Le lendemain, une nouvelle annonce tombe : pour des raisons de sécurité, la course sera neutralisée après le franchissement de la porte virtuelle, de manière à permettre aux skippers de s’abriter en attendant le passage de la dépression. Puis, dans la nuit de vendredi à samedi, l’organisation prend la lourde décision de mettre un terme définitif à la course une fois la porte franchie, afin de préserver les skippers et leur bateau.

Le choix de la raison 

Alors qu’elle fait face à des conditions météo musclées, Isabelle se débat en parallèle avec une avarie survenue sur sa grand-voile, déchirée au-dessus de troisième ris. Le samedi 18 juin, après avoir étudié une nouvelle fois la météo en fin de matinée, la navigatrice annonce sa décision d’abandonner la course. Le choix de la prudence, alors qu’elle ne se situait plus qu’à une cinquantaine de milles de la ligne d’arrivée :

« Je me suis battue jusqu’au bout. Sur la fin je voyais des conditions où je pouvais me rattraper en vitesse perdue lors de moments de transition. Mais tout a dégringolé quand j’ai vu l’état de la grand-voile… Cette décision de faire demi-tour et d’abandonner la course a été difficile à prendre. Je voulais à tout prix éviter une mise en danger supplémentaire pour mon bateau et moi-même. En Islande, il n’y avait pas d’abri possible. Renoncer si près du but est le genre de décision qui paraît à tout marin absolument absurde. Mais la route jusqu’à la ligne d’arrivée était devenue trop compliquée, trop risquée.

Je suis désolée pour mon équipe, pour mon sponsor, la MACSF, ainsi que pour toutes les personnes qui me suivent. Je suis aussi désolée pour la Direction de Course de la Vendée Arctique qui a dû gérer tout cela et pour qui ça n’a pas été facile. Je pense avoir pris ma décision en bon marin. »

La Vendée Arctique – Les Sables d’Olonne était la première des cinq courses qualificatives au Vendée Globe 2024. Si son abandon ne lui a pas permis de se qualifier directement pour le tour du monde, Isabelle a tout de même engrangé près de 1500 milles au classement des IMOCA Globe Series.

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