Samedi 26 juin 2021

« Avec Fabien, nous sommes en phase de rodage »

Depuis le début du mois de juin, trois sorties de 24 heures ont été programmées au large de Lorient. Lors de ces sessions d’entraînement, le duo formé par Isabelle et son co-skipper Fabien Delahaye a navigué bord à bord avec l’IMOCA Initiatives Cœur (Samantha Davies). Notre skipper nous explique l’enjeu et le programme de ces sorties. 

Quels sont les objectifs de ces premières navigations avec Fabien ?

Ces cessions d’entraînement doivent tout d’abord permettre à Fabien de trouver ses repères à bord, et de prendre le bateau en main. Au fil des navigations, il va acquérir de nouveaux réflexes et automatismes. Le second objectif vise à caler notre fonctionnement en double pendant les manœuvres, car cela ne s’appréhende pas de la même manière, selon que l’on navigue en double ou en solitaire. A deux, c’est une toute autre chorégraphie qui se déroule. Ces sorties nous permettent d’identifier nos forces et atouts respectifs, dans l’optique de les exploiter de manière optimale quand nous serons en course. En parallèle, nous affinons notre routine à bord pendant la nuit, avec l’alternance veille / repos. En bref, nous sommes en pleine phase de rodage, l’objectif étant d’être tous les deux opérationnels le plus rapidement possible.

Un mot sur les conditions météo de votre dernière sortie (du 22 au 23 juin) ?

Notre troisième navigation s’est révélée beaucoup plus ventée que les deux autres. Cela nous a permis de rentrer dans le vif du sujet, très concrètement. Je m’explique : avec un IMOCA à foil, l’objectif est de naviguer vite tout en préservant son bateau. Il est indispensable d’expérimenter différentes allures et conditions météo pour savoir où se situe la limite à ne pas franchir. Le fait de pouvoir naviguer au portant lors de nos récents entraînements nous a permis de jauger le bateau. Si ses foils ne sont pas initialement tipés pour le portant, l’IMOCA MACSF se comporte plutôt bien dans ces conditions. C’est très positif.

Quel effet cela fait-il de reprendre la navigation en duo après une si longue période de solitaire ?

Déjà, je dois avouer que cela m’a fait un bien fou de retrouver mon bateau. C’est un peu mon deuxième « chez moi ». La reprise de la navigation est d’autant plus agréable que je retrouve l’IMOCA MACSF avec tout son potentiel. En effet, durant le Vendée Globe, j’ai été contrainte de naviguer en mode « dégradé » depuis le moment où j’ai passé le cap Horn, afin de préserver mon bateau au maximum suite à la casse du vérin de quille. Forcément, c’était une grande frustration. Avec Fabien, je repars sur des bases totalement vierges, avec une nouvelle histoire à écrire. Il faut bien avouer que la navigation à deux est vraiment confortable : les manœuvres sont moins fatigantes, les périodes de repos sont plus longues et donc plus bénéfiques. On peut vraiment s’appuyer l’un sur l’autre. Je suis rentrée beaucoup moins fatiguée à l’issue de nos sessions d’entraînement. Je n’ai pas encore complètement récupéré toute mon énergie depuis le Vendée Globe. Aussi, ce format de navigation en duo est totalement en phase avec ce que j’ai envie de vivre cette année. L’autre avantage du double est de pouvoir confronter les regards. J’ai énormément navigué sur mon bateau et je fais certaines actions automatiquement. Fabien va me permettre de remettre des choses en question, car il n’a pas d’a priori.

Pourquoi ce programme d’entraînement à deux bateaux avec Initiatives Cœur ?

Cette configuration d’entraînement sert des objectifs très vertueux. Naviguer bord à bord avec Initiatives Cœur nous permet de comparer nos vitesses, de nous jauger, d’échanger sur les réglages. L’idée vise à progresser ensemble, en s’entraidant mutuellement et en étant attentif à l’attitude de l’autre bateau. Par ailleurs, ce format nous pousse à donner le meilleur de nous-mêmes, puisque l’on navigue en « mode course ». En fait, on se met une forme de pression. C’est un super cadre de travail, à l’intérieur duquel nous nous autorisons de nombreuses expérimentations, avec beaucoup de liberté. Cette démarche est réellement constructive.

Quelles sont les prochaines étapes d’entraînement ? Allez-vous conserver ce format de 24h ou évoluer vers des sorties plus longues ?

Nous allons conserver ce rythme jusqu’à la Rolex Fastnet (départ le 8 août), en réalisant plus ou moins chaque semaine une sortie 24 heures, avec une nuit en mer. Pour le moment, nous n’avons pas prévu de formats d’entraînement plus longs, pour la simple raison que Fabien et moi avons tous les deux récemment vécu des courses qui ont duré plusieurs semaines : une transatlantique pour Fabien (la Transat en Double Concarneau – Saint-Barthélemy en Figaro) et un tour du monde pour ma part. Nous avons conservé les réflexes acquis lors de ces expériences au long cours, et les automatismes sont encore bien ancrés en nous. Après ces longues navigations, nous avons tous les deux besoin de récupérer et de nous ressourcer. Nous visons donc un format d’entraînement qui permette de nous préserver. L’idée n’est pas de partir au grand galop tout de suite, ce ne serait pas opportun. La Transat Jacques Vabre reste notre objectif numéro un, et c’est à ce moment-là que nous pourrons libérer tout notre potentiel. Les courses d’avant-saison servent justement de calage et de préparation en vue de cette échéance qui nous attend en novembre.

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